Face nord des Grandes Jorasses, la No Bonatt

Immense et austère, cette face nord mythique frise les 1200 m de haut.
Fort connu pour son fameux éperon Walker, cette face recèle en fonction des conditions de multiples itinéraires mixtes mais parfois à prédominance glace.

Cette année 2015 fut un cru exceptionnel. Le mauvais temps de la fin août carapace de glace toutes les faces nord du massif. Le soleil étant plus bas à cette époque va préserver les placages de glace formés dans les goulottes et sur les dalles rocheuses.

Les cordées s’enchainent en face nord des Jorasses mais mes obligations professionnelles ne me permettent pas de profiter du créneau.
Beaucoup de passages dans la Mac Intyre mais assez peu dans cette fameuse Bonatti-Vaucher, ouverte par Walter Bonatti et Michel Vaucher en 4 jours de l’été 64.
C’est l’année pour la faire, beaucoup de glace à part quelques courtes sections rocheuses.

Avec Maxence Horvath, nous ne pouvons nous libérer que début octobre. Mais le mauvais temps du sud et une période de foehn à déjà commencé à « sécher » la face, la glace s’est amincie…

Après un repérage minutieux de la face depuis le refuge, nous optons pour la combinaison Bonatti-Vaucher / No Siesta, la partie haute de la Bonatti-Vaucher ayant beaucoup trop séché durant la période.
Cette combinaison nous permettra d’utiliser les parties les mieux englacées de la face pour un itinéraire plus homogène.
Ce panachage d’itinéraires a été inauguré 4 ans plus tôt par Julien Désécures et Bruno Soursac et donne une voie de 1100 m coté V, WI5+, M6+, X.

Face nord des Grandes Jorasses et le tracé de la No-Bonatt

Nous avalons rapidement les pentes de glaces et les goulottes menant au névé médian.
A partir de là, notre ascension se retrouvera ralentit par des passages mixtes difficilement protégeables.

Grande traversée sous le bouclier
Une cordée dans la classique Mac Intyre au centre de la face
Partie médiane
Très beau système de placage

Arrivée sur le névé de « l’Araignée », nous traversons sur la droite pour rejoindre la magnifique rampe de sortie de « No Siesta ».

Nous atteignons le sommet de nuit et commençons à redescendre par les rochers Whymper situés en rive droite du sérac suspendu de la face sud. Assommé par la fatigue et l’altitude, nous profitons d’un petit replat enneigé pour bivouaquer et finir la descente le lendemain.
Levé de soleil et mer de nuages sur le val d'Aoste
Le mauvais temps arrive par le sud, nous finirons la descente sous la pluie...
le versant italien du Mont Blanc
Une longue descente nous attend mais c’est avec une grande sérénité que nous l’abordons, le plus dure est fait, je connais bien cet itinéraire et nous savons que nous allons rester concentré jusqu’au bout !